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Délai pour réclamer une facture impayée​ : Le guide pratique

By 3 novembre 2025 No Comments

Le délai pour réclamer une facture impayée est de 2 ans si votre client est un particulier et de 5 ans s’il s’agit d’un professionnel.

Voilà la réponse brute. Mais entre connaître ce délai et l’utiliser correctement pour récupérer votre argent, il y a un monde. Beaucoup de créanciers laissent filer les semaines en se disant qu’ils ont le temps. Grosse erreur. D’autres calculent mal leur date limite et se réveillent trop tard.

Pire encore : certains ignorent que des actions simples peuvent remettre le compteur à zéro et leur donner un nouveau délai complet.

Cet article vous explique comment calculer précisément votre marge de manœuvre et surtout comment agir efficacement avant que vos droits ne s’évaporent.

Points clés à retenir

  • Délai légal : 2 ans pour un particulier, 5 ans pour un professionnel à partir de la date d’échéance (pas la date d’émission)
  • Cas spéciaux : 1 an pour télécom/internet, 5 ans pour les charges de copropriété, 3 à 5 ans pour les loyers selon le client
  • Agir vite : relance amiable dès J+1, mise en demeure sous 15 jours, action judiciaire avant les 6 derniers mois (particulier) ou la 4ème année (pro)
  • Prolonger le délai : une reconnaissance de dette écrite ou un paiement partiel remet le compteur à zéro pour 2 ou 5 ans complets
  • Piège majeur : avec un particulier, passé 2 ans le juge rejette d’office votre demande même si le client ne dit rien
  • Preuves essentielles : conservez tous les échanges écrits, accusés de réception et traces de paiement pendant 10 ans minimum

Combien de temps avez-vous pour réclamer votre facture ?

Les délais légaux selon votre type de client

Votre client ne paie pas ? Le temps file plus vite que vous ne le pensez. La loi fixe un délai de prescription qui varie selon que vous facturez un particulier ou un professionnel. Passé ce délai, impossible de saisir le tribunal pour forcer le paiement. Votre créance devient juridiquement irrécouvrable.

Pour un client professionnel, vous disposez de 5 ans à partir de la date d’échéance. C’est ce qu’on appelle la prescription commerciale. Entre entreprises, le législateur accorde ce délai pour tenir compte des relations d’affaires qui se prolongent parfois.

Avec un particulier, l’histoire change complètement. Vous n’avez que 2 ans. Point final. Le Code de la consommation protège les consommateurs contre l’accumulation de dettes anciennes. Deux ans pour agir, sinon vous perdez définitivement le droit d’engager une action en justice.

Mais certaines factures suivent leurs propres règles.

Voici les cas particuliers à connaître :

  • Télécom et internet : 1 an seulement (que votre client soit pro ou particulier)
  • Charges de copropriété : 5 ans pour tous
  • Loyers et charges locatives : 3 ans si le locataire est un particulier, 5 ans pour un professionnel

Le tableau ci-dessous récapitule les principaux délais :

Type de créance Client professionnel Client particulier
Vente de marchandises / Prestations de services 5 ans 2 ans
Télécom et internet 1 an 1 an
Charges de copropriété 5 ans 5 ans
Loyers et charges locatives 5 ans 3 ans
Crédit professionnel 5 ans 5 ans

Maintenant que vous connaissez le délai applicable, reste à calculer précisément votre date limite.

Comment calculer précisément votre date limite ?

Le délai de prescription ne court pas depuis la date d’émission de votre facture. Grosse erreur que font beaucoup de créanciers. Le point de départ, c’est la date d’échéance. Nuance qui change tout.

La date d’échéance correspond au jour où le paiement devient exigible. Entre professionnels, c’est généralement 30 jours après l’émission de la facture (sauf accord particulier dans vos conditions générales de vente). Pour les particuliers, le paiement est souvent immédiat sauf mention contraire.

La formule de calcul reste simple : prenez la date d’échéance puis ajoutez 2 ou 5 ans selon votre débiteur. Cette date finale représente votre deadline absolue pour saisir la justice.

Un exemple concret vous aidera. Vous émettez une facture le 10 janvier 2023 avec un délai de paiement de 30 jours. Votre date d’échéance tombe donc le 10 février 2023. Si votre client est un particulier, vous devez agir avant le 10 février 2025. Client professionnel ? Vous avez jusqu’au 10 février 2028. Facile non ?

Attention quand même. Si vous n’avez pas indiqué de délai de paiement sur la facture, le compteur démarre dès la livraison du bien ou l’exécution de la prestation. La date d’émission de la facture ne compte plus dans ce cas.

Les pièges de calcul à éviter

Les paiements échelonnés piègent souvent les moins vigilants. Vous accordez un échéancier sur 6 mois ? Chaque mensualité possède son propre délai de prescription. Vous ne pouvez pas compter depuis la première échéance pour réclamer la dernière. Chaque impayé court indépendamment.

Les conditions suspensives compliquent aussi le calcul. Imaginez une vente immobilière conditionnée à l’obtention d’un prêt bancaire. Le délai ne démarre qu’au moment où la banque accorde le crédit. Pas avant. La réalisation de la condition fait partir le chronomètre.

Dernier piège : certaines de vos actions passées ont peut-être déjà prolongé votre délai sans que vous le sachiez. Un email où le client reconnaît devoir la somme ? Un paiement partiel de quelques euros ? Ces éléments remettent le compteur à zéro. Vous repartez pour un nouveau délai complet de 2 ou 5 ans. D’où l’importance de conserver tous vos échanges écrits avec le client.

Vous connaissez maintenant votre marge de manœuvre temporelle. Passons à l’action concrète pour récupérer votre créance avant qu’il ne soit trop tard.

Les 3 étapes pour récupérer votre argent dans les temps

Étape 1 – Relance amiable rapide (dès J+1 du retard)

Le premier jour de retard compte déjà. Vous attendez une semaine ? Deux semaines ? Vous perdez du temps précieux. La relance immédiate donne le ton : vous suivez vos encours de près.

Décrochez votre téléphone dès que vous constatez l’impayé. Pas de message vocal. Vous voulez parler directement au client. Ton professionnel mais ferme. Vous ne jouez pas les durs, vous cherchez à comprendre. Oubli ? Problème avec la facture ? Difficulté de trésorerie passagère ? La raison change tout pour la suite.

Doublez cet appel avec un email le même jour. Une relance courtoise qui rappelle le montant dû et la date d’échéance dépassée. Gardez une trace écrite de chaque échange. Ces preuves vous serviront si la situation dégénère.

Votre client propose de payer en plusieurs fois ? Excellente nouvelle. Mais attention : formalisez cet accord par écrit immédiatement. Un simple email de confirmation suffit. Pourquoi tant de précautions ? Parce que cette reconnaissance écrite de dette remet votre délai de prescription à zéro. Vous repartez pour 2 ou 5 ans complets.

Même chose pour les paiements partiels. Un versement de 50 euros sur une facture de 2000 euros ? C’est une reconnaissance de dette. Le compteur redémarre. Voilà pourquoi il faut toujours accepter les paiements partiels plutôt que d’exiger le solde complet.

Ne vous contentez pas d’une seule relance. Programmez-en plusieurs : J+3, J+7, J+10. Un logiciel de relance automatisé vous fait gagner un temps fou sur cette phase. Notez tout : date des appels, contenu des conversations, promesses faites. Ces détails deviennent des preuves juridiques.

Quinze jours sans réponse malgré vos relances ? Le moment est venu de passer la vitesse supérieure.

Étape 2 – Mise en demeure formelle (après 15 jours sans réponse)

La mise en demeure change de registre. Vous sortez de l’amiable pour entrer dans le formel. Ce courrier possède une vraie valeur juridique. D’où l’importance de le faire correctement.

Format obligatoire : recommandé avec accusé de réception. Pas d’email, pas de lettre simple. Vous devez pouvoir prouver que le débiteur a bien reçu votre courrier. L’accusé de réception daté sert de preuve.

Côté contenu, certains éléments restent incontournables. Mentionnez le montant exact de la créance en détaillant le principal et les éventuelles pénalités déjà appliquées. Rappelez la date d’échéance initiale. Accordez un nouveau délai de paiement (7 à 10 jours constituent un standard raisonnable). Précisez les pénalités de retard applicables et l’indemnité forfaitaire de 40 euros prévue par la loi. Terminez par un avertissement clair : faute de règlement, vous engagerez une procédure de recouvrement judiciaire.

Cette mise en demeure déclenche automatiquement plusieurs effets. Les pénalités de retard courent désormais. L’indemnité forfaitaire de 40 euros devient exigible. Vous créez un pré-requis obligatoire avant toute action en justice. Aucun juge ne vous recevra si vous n’avez pas d’abord tenté cette étape formelle.

Un point juridique essentiel : la mise en demeure seule ne prolonge pas votre délai de prescription. Elle ne suspend rien, elle n’interrompt rien. Elle prouve simplement votre diligence si le dossier finit devant un tribunal. Conservez précieusement l’accusé de réception. Cette preuve d’envoi peut faire toute la différence.

Dix jours après réception de la mise en demeure, toujours rien ? Vous devez maintenant envisager le recours judiciaire.

Étape 3 – Action judiciaire (en dernier recours, mais pas trop tard)

Le timing compte autant que la procédure elle-même. Vous approchez des 6 derniers mois avec un particulier ou de la quatrième année avec un professionnel ? Stop. N’attendez plus. Lancez l’action maintenant. Trop de créanciers se réveillent au dernier moment puis paniquent.

L’injonction de payer reste la procédure la plus utilisée en recouvrement de créances. Rapide, économique, efficace quand votre créance est certaine (pas contestable), liquide (montant chiffré) et exigible (échéance dépassée). Vous déposez une requête auprès du tribunal compétent. Le juge examine votre dossier sur pièces. S’il vous suit, il rend une ordonnance qui vaut titre exécutoire.

Mais attention au piège juridique : seule la signification de cette ordonnance par un commissaire de justice interrompt votre délai de prescription. Le simple dépôt de la requête ne compte pas. Vous pouvez obtenir l’ordonnance puis laisser traîner la signification. Grosse erreur. Le délai continue de courir jusqu’à ce que le commissaire de justice remette l’acte au débiteur.

Le débiteur peut contester l’ordonnance dans le mois qui suit la signification. Dans ce cas, vous basculez vers une audience contradictoire classique. Plus long, plus cher, mais parfois inévitable.

L’assignation en paiement prend le relais quand un litige existe dès le départ. Client qui conteste la qualité de la prestation ? Facture elle-même remise en cause ? Vous devez passer par cette procédure contradictoire. Avantage : dès que vous délivrez l’assignation, le délai s’interrompt immédiatement. Vous repartez pour 5 ans même avec un particulier.

Le référé-provision sert en urgence. Votre débiteur est au bord du dépôt de bilan ? Sa situation financière se dégrade vite ? Cette procédure rapide vous permet d’obtenir une provision sur une créance non sérieusement contestable. Quelques semaines suffisent contre plusieurs mois pour une procédure classique.

Vous possédez déjà un titre exécutoire (jugement, ordonnance signifiée) ? Le commissaire de justice peut directement procéder aux saisies. Compte bancaire, matériel professionnel, créances clients. Un bon logiciel de recouvrement contentieux vous aide à suivre ces procédures d’exécution.

Certaines actions en cours de procédure prolongent aussi vos délais. Une médiation acceptée par les deux parties ? Le délai de prescription se suspend. Il ne court plus. Quand la médiation se termine, vous récupérez au minimum 6 mois garantis. Même chose pour une procédure participative. Ces dispositifs vous donnent de l’oxygène si vous approchez de la date limite.

La différence fondamentale entre client professionnel et particulier mérite qu’on s’y arrête. Avec un pro, vous pouvez techniquement saisir le tribunal même après les 5 ans. L’article 2247 du Code civil prévoit que le juge ne peut pas soulever d’office la prescription. Tant que votre débiteur ne l’invoque pas, la procédure continue. Stratégie hasardeuse quand même : un professionnel bien conseillé soulèvera immédiatement la prescription.

Avec un particulier, aucune marge de manœuvre. Le Code de la consommation impose au juge de rejeter d’office toute action après 2 ans. Votre débiteur peut rester muet, le juge vous déboute automatiquement. D’où l’importance vitale de respecter scrupuleusement ce délai quand vous facturez des consommateurs.

Ce qu’il faut retenir pour ne rien louper

Vous avez maintenant toutes les cartes en main pour gérer vos factures impayées sans perdre vos droits.

Le tableau ci-dessous synthétise l’essentiel : les délais applicables et les actions à mener selon votre situation.

Élément Client particulier Client professionnel
Délai de prescription 2 ans 5 ans
Point de départ Date d’échéance de la facture (émission + délai de paiement)
Étape 1 : Relance amiable Dès J+1 : appel + email, formaliser tout accord par écrit
Étape 2 : Mise en demeure Après 15 jours : LRAR avec montant, délai, pénalités
Étape 3 : Action judiciaire Avant 18 mois Avant la 4ème année
Reconnaissance de dette Remet le délai à zéro (nouveau délai complet)
Après expiration du délai Juge rejette d’office Possible si débiteur ne conteste pas

Trois règles simples garantissent vos chances de recouvrement :

  • calculez votre deadline dès l’impayé constaté,
  • agissez dans les 15 premiers jours avec une relance structurée,
  • conservez chaque preuve d’échange.

Le reste découle naturellement. Vous savez désormais combien de temps vous avez et comment l’utiliser à bon escient.

À vous de jouer.